Capitale européenne de la culture Marseille-Provence 2013

José Manuel Durão Barroso — Président de la Commission européenne

Marseille-Provence 2013

15-1-2013 — /europawire.eu/ —

Monsieur le premier ministre,

Mesdames et Messieurs les ministres,

Monsieur le Sénateur-maire,

Mesdames et Messieurs les élus,

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs,

C’est un grand honneur pour moi d’être avec vous aujourd’hui à Marseille et de participer avec le Premier Ministre Jean Marc Ayrault au lancement de Marseille-Provence 2013.

Permettez-moi tout d’abord au nom de la Commission et en mon propre nom de vous exprimer, monsieur le Premier Ministre, ainsi qu’aux familles des victimes, mes plus sincères condoléances pour les Français qui viennent de perdre la vie au Mali et en Somalie. Croyez bien que nous vous accompagnons dans ces moments difficiles et que nous soutenons la courageuse action des troupes françaises.

Je voudrais donc tout d’abord rendre hommage à tous ceux qui ont contribué à ce magnifique projet, largement mobilisateur, comme en témoigne votre présence si nombreuse aujourd’hui.

Je remercie du fond du cœur tous les Marseillais et tous les Provençaux pour leur superbe accueil.

Etre capitale européenne de la culture cela signifie toujours de grandes responsabilités, d’incroyables défis et de belles réalisations, avec toute la fierté légitime qui les accompagne.

C’est aussi à chaque fois un magnifique message de confiance dans l’avenir, dans le talent de nos jeunes créateurs, dans la diversité des cultures et la force de la solidarité européenne.

C’est ce que j’ai ressenti l’année dernière au Portugal, à Guimarães. C’est aussi ce que je ressens aujourd’hui à Marseille.

Jean Vilar disait de “l’art du théâtre”, et je le cite, qu’il “ne prend toute sa signification que lorsqu’il parvient à assembler et à unir.”

De la même façon Marseille-Provence 2013 assemble et unit non seulement les artistes, les disciplines artistiques et les publics, mais aussi les générations, les communes et les nationalités.

Et c’est bien cela l’esprit des capitales européennes de la culture; rassembler les européens et s’ouvrir au monde.

C’est aussi cela qui est au cœur de l’idéal européen : la conviction que nous pouvons nous enrichir de nos diversités en nous rassemblant dans une union ouverte au monde et forte de ses valeurs fondatrices.

Et la France est sans aucun doute un pays très emblématique de cet idéal. La France, pays fondateur de l’Union européenne. Pays dont la culture au cours des siècles n’a cessé de rayonner à travers le monde, avec aujourd’hui 890 millions de femmes et d’hommes, réunis au sein de la francophonie, partageant l’usage de cette belle langue qui est le français. Et comment ne pas mentionner aussi la place si particulière des intellectuels dans la société française. Ceci témoigne de la confiance en la force des idées, car les intellectuels sont en grande mesure la conscience critique de la société.

Si vous me permettez une note personnelle, j’y suis d’autant plus sensible que, comme de très nombreux Portugais, je suis un francophile convaincu, le Français est ma deuxième langue et j’entretiens depuis toujours des affinités fortes avec la culture française.

Mesdames et Messieurs,

Aujourd’hui, notre interdépendance est plus grande que jamais à travers les échanges toujours plus nombreux et étroits entre nos cultures, nos sociétés, nos économies. Il nous appartient donc, de chercher à apporter ensemble des solutions communes à des problèmes que nous partageons tous. Tel est bien le sens du projet européen qui dès sa création a porté en lui une vision cosmopolite.

Et Marseille-Provence 2013, par sa dimension méditerranéenne et son rayonnement est une parfaite illustration de cette ouverture européenne au monde.

Et comment ne pas se rappeler ici à Marseille, la cité phocéenne, que selon l’étymologie grecque, l’Europe est précisément “la femme au vaste regard” (eurus opsis).

La culture européenne elle-même a toujours visé un horizon lointain, universel, son regard a toujours porté au loin.

Et désormais, côte à côte, tournés vers la mer, le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée – le MuCEM -, et la Villa Méditerranée, deux splendides réalisations architecturales, témoigneront de cette ouverture au monde et plus précisément, ici, de la diversité de la Méditerranée, celle que les Romains appelaient Mare Nostrum.

Comme l’a défini l’historien Fernand Braudel – et je cite: “Méditerranée est mille choses à la fois, non pas un paysage mais d’innombrables paysages, non pas une mer mais une succession de mers, non pas une civilisation mais des civilisations entassées les unes sur les autres. ”

Une Méditerranée qui ne cesse de nous surprendre. Et le printemps 2011 restera dans l’histoire comme celui de l’explosion de l’espérance démocratique dans des pays dont la jeunesse s’est retrouvée dans une seule et même aspiration : celle du respect de la dignité individuelle, de la liberté et de la démocratie.

Et l’idéal européen cela veut dire aussi se tenir aux côtés de ceux-là qui se battent pour ces valeurs universelles qui nous sont si chères.

En contribuant à développer les rapports euro-méditerranéens à travers de multiples événements culturels, Marseille-Provence 2013 participe pleinement à cette ambition.

Mesdames et Messieurs,

Nous le voyons bien, l’Union européenne ne peut être réduite, comme certains pourraient le croire ou le vouloir, à un simple marché. Elle est dans son essence même un projet politique, et pourquoi ne pas le dire, un projet de culture.

Ainsi que l’a écrit un autre grand nom de la francophonie, de la culture et de l’Europe, mon professeur à Genève, Denis de Rougemont, dont je tiens ici à honorer la mémoire, “l’Europe est une culture ou elle n’est pas”.

C’est cette Europe des valeurs qui a été distinguée par le Prix Nobel de la Paix 2012. Une Union qui est avant tout une communauté démocratique fondée sur les principes de paix, de dignité humaine, de liberté, d’égalité et de solidarité.

Dès que ces valeurs sont mises à l’épreuve, c’est l’existence même de l’Union européenne qui est mise à l’épreuve.

Alors que l’Europe est à la croisée des chemins et doit affirmer sa place dans un monde de plus en plus interdépendant, nous avons plus que jamais besoin, aujourd’hui, de la mobilisation des femmes et des hommes de culture pour défendre ces valeurs fondamentales.

On ne peut pas laisser l’initiative du débat européen aux seules voix populistes.

Cette année 2013 est l’Année européenne de la Citoyenneté, c’est donc aussi l’occasion de porter ce débat sur l’avenir de l’Europe à la société civile dont vous êtes tous ici des membres actifs. Ceux qui croient en l’Europe doivent parler haut et fort.

Et j’appelle le monde de la culture à se mobiliser et à participer activement au débat sur le futur de l’Europe.

Il y a urgence à établir un vrai dialogue européen entre le monde de la culture et le monde politique.

Je vous invite tous, ici et à travers l’Europe, à vous joindre à un débat ouvert sur l’Union européenne et ses valeurs.

L’Europe a besoin de vous tous pour communiquer une émotion, une énergie, un souffle autour de notre projet commun. Ce qui est en jeu, c’est la question du sentiment d’appartenance à une même communauté qui va au-delà de la seule communauté nationale; c’est le sentiment d’une destinée européenne partagée.

C’est par la culture – force d’innovation et d’initiative – que nous pourrons enraciner ce sentiment de destinée partagée. Parce que l’Europe a une âme; c’est sa culture dans toute sa diversité.

Notre cohésion sociale, notre prospérité économique et notre rayonnement international reposent sur l’imagination, la créativité et l’innovation. C’est à partir de nouvelles idées, de nouveaux concepts, de nouveaux projets que nous pourrons répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés et donner forme à l’avenir auquel nous aspirons.

L’Europe doit donc aider les talents, dans toute leur diversité, à se réaliser pleinement. Et même dans un environnement budgétaire difficile, l’Europe ne doit pas hésiter à investir dans la culture.

Investir dans la culture c’est contribuer à créer des emplois dans un secteur porteur et stimuler une créativité européenne qui nous est plus que jamais nécessaire.

C’est pourquoi la Commission européenne a proposé pour le prochain budget de l’Union européenne une augmentation significative de l’enveloppe allouée à la culture.

Et c’est pour moi une priorité claire. Comme je l’ai dit à la cérémonie de remise du Prix Nobel de la Paix à l’Union européenne, la culture et la science sont au cœur même de l’ouverture européenne, elles nous enrichissent en tant qu’individus et créent des liens qui dépassent les frontières. La culture nous est indispensable.

Mesdames et Messieurs,

Au cours de cette année le cœur de Marseille et de sa région battra au rythme de centaines de projets culturels qui seront autant d’occasions de partage et de fêtes. Plus à l’Est, en Slovaquie, la ville de Košice, autre capitale européenne de la culture 2013, que je tiens à saluer, va connaître la même effervescence.

Etre capitale européenne de la culture, cela signifie aussi des retombées positives pour l’économie, l’image et le dynamisme d’une ville et de sa région.

Mais nous savons bien qu’au-delà de cette année le défi sera de réussir à installer durablement cette dynamique.

Une grande figure méditerranéenne, Albert Camus a écrit que “la vraie générosité envers l’avenir consiste à tout donner au présent.”

Quand je vois tout le talent, tout l’enthousiasme, toute la créativité et toute la solidarité que vous avez donnés à ce présent-ci, je ne doute pas que vous réussirez à transformer l’essai et à inscrire durablement dans l’avenir cette nouvelle dynamique.

Je vous souhaite à tous une très belle année européenne de la culture 2013.

Follow EuropaWire on Google News
EDITOR'S PICK:

Comments are closed.